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قراءة كتاب Esther
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sommeil qui le fuit,
Pour écarter de lui ces images funèbres,
Il s'est fait apporter ces annales célèbres
Où les faits de son règne, avec soin amassés, 395
Par de fideles mains chaque jour sont tracés.
On y conserve écrits le service et l'offense,
Monuments éternels d'amour et de vengeance.
Le Roi, que j'ai laissé plus caime dans son lit,
D'une oreille attentive ecouté ce récit. 400
AMAN.
De quel temps de sa vie a-t-il choisi l'histoire?
HYDASPE.
Il revoit tous ces temps si remplis de sa gloire,
Depuis le fameux jour qu'au trône de Cyrus
Le choix du sort plaça l'heureux Assuérus.
AMAN.
Ce songe, Hydaspe, est donc sorti de son idée? 405
HYDASPE.
Entre tous les devins fameux dans la Chaldée,
Il a fait assembler ceux qui savent le mieux
Lire en un songe obscur les volontés des cieux.
Mais quel trouble vous-même aujourd'hui vous agite?
Votre âme, en m'écoutant, paraît toute interdite. 410
L'heureux Aman a-t-il quelques secrets ennuis?
AMAN.
Peux-tu le demander dans la place où je suis,
Haï, craint, envié, souvent plus misérable
Que tous les malheureux que mon pouvoir accable?
HYDASPE.
Hé! qui jamais du Ciel eut des regards plus doux? 415
Vous voyez l'univers prosterné devant vous.
AMAN.
L'univers? Tous les jours un homme. . . un vil esclave,
D'un front audacieux me dédaigne et me brave.
HYDASPE.
Quel est cet ennemi de l'État et du Roi?
AMAN.
Le nom de Mardochée est-il connu de toi? 420
HYDASPE.
Qui? ce chef d'une race abominable, impie?
AMAN.
Oui, lui-même.
HYDASPE.
Hé, Seigneur! d'une si belle vie
Un si faible ennemi peut-il troubler la paix?
AMAN.
L'insolent devant moi ne se courba jamais.
En vain de la faveur du plus grand des monarques 425
Tout révère à genoux les glorieuses marques;
Lorsque d'un saint respect tous les Persans touchés
N'osent lever leurs fronts à la terre attachés,
Lui, fierement assis, et la tête immobile,
Traite tous ces honneurs d'impiété servile, 430
Présente à mes regards un front séditieux,
Et ne daignerait pas au moins baisser les yeux.
Du palais cepeudant il assiège la porte:
A quelque heure que j'entre, Hydaspe, ou que je sorte,
Son visage odieux m'afflige et me poursuit; 435
Et mon esprit troublé le voit encor la nuit.
Ce matin j'ai voulu devancer la lumière:
Je l'ai trouvé couvert d'une affreuse poussière,
Revêtu de lambeaux, tout pâle; mais son oeil
Conservait sous la cendre encor le même orgueil. 440
D'où lui vient, cher ami, cette impudente audace?
Toi, qui dans ce palais vois tout ce qui se passe,
Crois-tu que quelque voix ose parler pour lui?
Sur quel roseau fragile a-t-il mis son appui?
HYDASPE.
Seigneur, vous le savez, son avis salutaire 445
Découvrit de Tharès le complot sanguinaire.
Le Roi promit alors de le récompenser.
Le Roi, depuis ce temps, paraît n'y plus penser.
AMAN.
Non, il faut à tes yeux dépouiller l'artifice.
J'ai su de mon destin corriger l'injustice, 450
Dans les mains des Persans jeune enfant apporté,
Je gouverne l'empire où je fus acheté.
Mes richesses des rois égalent l'opulence.
Environné d'enfants, soutiens de ma puissance,
Il ne manque à mon front que le bandeau royal. 455
Cependant (des mortels aveuglement fatal!)
De cet amas d'honneurs la douceur passagère
Fait sur mon coeur à peine une atteinte légère;
Mais Mardochée, assis aux portes du palais,
Dans ce coeur malheureux enfonce mille traits; 460
Et toute ma grandeur me devient insipide,
Tandis que le soleil éclaire ce perfide.
HYDASPE.
Vous serez de sa vue affranchi dans dix jours:
La nation entière est promise aux vautours.
AMAN.
Ah! que ce temps est long à mon impatience! 465
C'est lui, je te veux bien cofier ma vengeance,
C'est lui qui, devant moi refusant de ployer,
Les a livrés au bras qui les va foudroyer.
C'était trop peu pour moi d'une telle victime:
La vengeance trop faible attire un second crime. 470
Un homme tel qu'Aman, lorsqu'on l'ose irriter,
Dans sa juste fureur ne peut trop éclater.
Il faut des châtiments dont l'univers frémisse;
Qu'on tremble en comparant l'offense et le supplice;
Que les peuples entiers dans le sang soient noyés. 475
Je veux qu'on dise un jour aux siècles effrayés:
«Il fut des Juifs, il fut une insolente race;
Répandus sur la terre, ils en couvraient la face,
Un seul osa d'Aman attirer le courroux,
Aussitôt de la terre ils disparurent tous.» 480
HYDASPE.
Ce n'est donc pas, Seigneur, le sang amalécite
Dont la voix à les perdre en secret vous excite?
AMAN.
Je sais que, descendu de ce sang malheureux,
Une éternelle haine a dû m'armer centre eux;
Qu'ils firent d'Amalec un indigne carnage; 485
Que jusqu'aux vils troupeaux tout éprouva leur rage,
Qu'un déplorable reste à peine fut sauvé.
Mais, crois-moi, dans le rang où je suis éléve,
Mon âme, à ma grandeur tout entière attachée,
Des intérêts du sang est faiblement touchée. 490
Mardochee est coupable; et que faut-il de plus?
Je prévins donc contre eux l'esprit d'Assuérus:
J'inventai des couleurs; j'armai la calomnie;
J'intéressai sa gloire; il trembla pour sa vie.
Je les peignis puissants, riches, séditieux, 495
Leur dieu même ennemi de tous les autres dieux.
«Jusqu'à quand souffre-t-on que ce peuple respire,
Et d'un culte profane infecte votre empire?
Étrangers dans la Perse, à nos lois opposés,
Du reste des humains ils semblent divisés, 500
N'aspirent qu'à troubler le repos où nous sommes,
Et détestés partout, détestent tous les hommes,
Prevenez,